L’agonie du Grand Orgue de St Nicolas (Nantes)

Scotch & Chiffons : L’agonie du Grand Orgue de la Basilique. Depuis plus de 130 ans, il accompagne nos joies, nos peines, les messes dominicales, les grandes fêtes…. De nombreux concertistes sont venus le jouer : il fait partie intégrante de la Basilique et du patrimoine Nantais. Il est devenu depuis ce terrible 18 juillet 2020 (incendie du Grand Orgue de la cathédrale), le plus grand instrument de la ville, avec ses 3 claviers, ses 3 moteurs, son pédalier, ses 54 jeux et ses plus de 3000 tuyaux. Après les bombardements de septembre 1943, qui l’ont entièrement détruit (sauf la structure basse de la tribune en bois), le Grand Orgue a été reconstruit en 1960 dans un style néo-classique. La ville de Nantes, propriétaire de l’instrument, l’a déjà sauvé par deux fois : en 1980, et en 2004. Depuis quelques années, notre orgue a entamé sa descente aux enfers : plus aucun concert d’orgue n’est possible au vu des très nombreux dysfonctionnements. Pourtant il sonne toujours direz-vous ! Mais n’avez-vous pas entendu des cornements surprenants, des couinements bizarres, un souffle bruyant etc… ? Alors qu’en est-il ? Et bien les organistes de notre paroisse font tout pour minimiser ses pannes pour que nos cérémonies soient le moins possibles perturbées, en changeant en permanence de claviers, de registres, en s’adaptant à chaque panne en cours de cérémonie, en utilisant le gros scotch et les chiffons. Ils n’hésitent pas à ramper dans les entrailles de l’orgue pour colmater les fuites, boucher des tuyaux indisciplinés, ou les déposer à terre, condamner des jeux, supprimer des tirasses, bannir des accouplements. Un des soufflets est éventré. Merci à eux de déployer tant d’énergie pour essayer de soutenir nos chants et nos assemblées malgré tout. Alors qu’est-il arrivé à notre orgue ? La restauration a minima de 2004, a permis de remettre l’orgue en état pendant une dizaine d’années. Depuis 17 ans, seul un entretien courant à la charge de la paroisse a été réalisé chaque année. Mais quelles sont les causes d’un déclin si rapide ? Plusieurs facteurs : -La poussière due à la longue restauration de notre église, -Les courants d’air permanents pendant plus de 5 ans, où les portes de la Basilique sont restées ouvertes hiver comme été, -L’ancien chauffage qui envoyait brutalement un air chaud à la tribune, passant de 10 à 20 degrés. Or un orgue est construit avec des matériaux vivants tel que, le bois, les peaux animales, le métal, il lui faut donc un environnement stable en température et hygrométrie. Nous avons alerté depuis plusieurs années la Ville de Nantes sur l’état de l’orgue et sa dégradation rapide. C’est en juillet dernier que la ville a mandaté un technicien conseil pour expertiser l’instrument en prévision d’une restauration ambitieuse. Lueur d’un espoir… A ce jour, nous suivons activement le dossier mais fort de constater que l’immobilisme de la Ville met nos nerfs à rude épreuve. Peut-on imaginer notre Basilique sans son grand orgue ? Peut-on imaginer nos cérémonies sans orgue ? Peut-on imaginer Nantes, la sixième ville de France, si fière de sa politique culturelle, sans un orgue digne de ce nom dans son cœur de ville ? Ce patrimoine est un véritable bien collectif, sa rénovation est cruciale. Car cet instrument n’est pas une pièce de musée : il constitue un trésor que l’on doit faire vivre grâce aussi à des animations culturelles. Mobilisons-nous tous pour sauver le Grand Orgue de Saint-Nicolas, patrimoine iconique nantais.
Mme Florence Ladmirault, organiste titulaire
P. Loïc Le Huen, curé
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